Droit à l’autodétermination du peuple sahraoui

11/11/1996

1. Le Centre Europe-Tiers Monde suit depuis de longues années le processus qui devrait amener le peuple sahraoui à pouvoir enfin exercer son droit à l’autodétermination. Il est donc légitime que notre organisation continue à vous faire part de ses préoccupations concernant la poursuite de l’occupation du Sahara occidental par le Maroc et cela malgré le fait que la communauté internationale, par la voix du Conseil de sécurité, ait décidé d’un plan de paix à mettre en oeuvre dans cette région. Ce plan symbolise pour les Sahraouis, outre le retour à la paix, la fin d’une période de plus de 20 ans de répression, de manque de liberté de circulation et d’expression. Ce plan n’a pas encore pu se concrétiser et le manque de détermination de l’Organisation des Nations Unies, il ne faut pas avoir peur de le dire, est responsable en très grande partie de cette situation. C’est pour cette raison principalement que nous intervenons aujourd’hui.

2. La République arabe sahraouie démocratique, membre de l’OUA et reconnue par plus de 70 Etats à travers le monde, vient de fêter le 27 février dernier son vingtième anniversaire, et pourtant le peuple sahraoui se bat toujours pour pouvoir exercer ses droits les plus élémentaires : s’autodéterminer. Combien de temps faudra-t-il encore pour que ce peuple puisse, par le choix des urnes et non des armes, définir son avenir ?

3. Mais, reprenons le rôle de l’ONU. Nous pourrions ici faire le rappel de toutes les résolutions adoptées depuis plus de 20 ans sur cette question, tant par l’Assemblée générale que par la Commission des droits de l’homme. Une étude historique de ces résolutions montrerait leur circularité: elles ont demandé, dans les années 80, l’ouverture de contacts directs entre les deux parties avant l’adoption en 1989 par le Conseil de sécurité du plan de paix. Aujourd’hui, le dernier rapport du Secrétaire général de l’ONU du 19 janvier 1996 demande à nouveau l’ouverture d’un dialogue entre les deux parties, et on peut penser qu’une résolution de la Commission, si elle est adoptée, aurait la même teneur. Cela veut-il dire que nous soyons revenus à la case départ ? Ce que nous savons, en tout cas, c’est que l’exécution du plan de paix est aujourd’hui gelée. En effet, depuis la fin de l’année dernière, le processus d’identification des votants est arrêté. Il faut dire que, depuis l’interprétation personnelle des critères d’identification par l’ancien Secrétaire général, M. Pérez de Cuéllar, à la veille de son départ, des difficultés ont surgi pour mener à bien cette opération particulièrement sensible. Il suffit de se souvenir de la déportation de milliers de Marocains au Sahara occidental pour venir grossir les votants potentiels, de l’exigence marocaine, au cours de l’année dernière, de faire inscrire comme autre votants potentiels des milliers de Marocains. Pour ce faire, il a déposé plus de 100 000 candidatures de personnes résidant au Maroc.

4. Nous ne reprendrons pas ici tous les éléments techniques du processus d’identification. Nous relèverons pourtant que le Secrétaire général, M. Boutros-Ghali, dans une lettre du 27 octobre 1995 au Conseil de sécurité, a proposé, pour débloquer la situation, qu’en l’absence d’un cheikh de l’une ou l’autre des parties, l’identification des votants puisse se faire sur la base de documents établis par l’Autorité coloniale espagnole. Cette proposition semble tout à fait justifiée dans un territoire anciennement colonisé par l’Espagne. Le Front Polisario a accepté cette proposition. Le Maroc l’a refusée, ce qui a donné lieu à d’intenses consultations. Le Secrétaire général a changé sa position et a prévu, dans son rapport du 24 novembre 1995, que l’identification se ferait, même en l’absence d’un représentant d’une des parties et sur la base de pièces mal définies. Cette volte-face du Secrétaire général, après le refus marocain, ne pourrait qu’enlever définitivement toute crédibilité au processus d’identification. Suite à la ferme opposition du Front Polisario, de l’OUA et de l’Algérie à cette nouvelle manoeuvre et, après plusieurs semaines de discussions, le Conseil de sécurité a adopté, à l’unanimité, fin décembre 1995, une nouvelle résolution.

5. Si cette nouvelle prise de position du Conseil de sécurité ne règle pas les questions concernant le processus d’identification, elle soutient la nécessité d’intensifier les consultations avec les deux parties et de proposer des pourparlers directs ou indirects pour aplanir les divergences. Enfin, et ceci concerne tous les Etats présents à la Commission des droits de l’homme, le Conseil de sécurité appelle les Etats à chercher des moyens pour aider les deux parties à trouver un terrain d’entente. Le CETIM aimerait ici appuyer cette demande du Conseil de sécurité et lancer un appel à tous les Etats qui veulent que la communauté internationale tienne les engagements qu’elle a pris en adoptant le plan de paix concernant le règlement du conflit au Sahara occidental.

6. Le Conseil de sécurité a fixé la date de fin mai comme échéance pour la présence de la MINURSO au Sahara occidental. Est-il réaliste de penser que jusque-là le processus d’identification des votants sera terminé et que le référendum sera en voie de réalisation ? Permettez-nous d’avoir des doutes sur ce timing. Pourtant, nous sommes certains que si les membres du Conseil de sécurité et d’autres membres de la communauté internationale s’engagent réellement pour le respect du plan de paix initial par les deux parties et sont déterminés à ce qu’un référendum juste et transparent se déroule au Sahara occidental, le processus devrait avancer.

7. Dans cette enceinte, nous savons combien les questions concernant les droits des peuples sont liées à celles qui concernent les droits de l’homme. Une occupation engendre forcément des violations des droits de l’homme, et le Sahara occidental en est un exemple flagrant. Dans la situation actuelle, les populations sahraouies qui vivent dans les camps de réfugiés et dans les zones occupées du Sahara occidental sont les victimes de cette situation. Les jeunes de 20 ans, nés dans les camps de réfugiés, ne voudront pas pendant très longtemps encore voir leur avenir détruit par manque de détermination de la communauté internationale qui, en adoptant un plan de paix, a pris des responsabilités envers les hommes, les femmes et les enfants de cette région.

8. Avant qu’il ne soit trop tard et que la situation humaine, militaire et politique ne se détériore encore plus, le CETIM réitère son appel à la responsabilité des Etats et, connaissant la complémentarité qui peut jouer dans certains cas entre Etats et organisations non gouvernementales, il est disposé à participer à toute initiative qui irait dans le sens d’une paix juste et durable dans la région.

Catégories Cas Déclarations Droits économiques, sociaux et culturels DROITS HUMAINS
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