L’asphyxie haïtienne : néocolonialisme, violence et ingérence étrangère

13/06/2024

Depuis son indépendance, le parcours tumultueux d’Haïti est marqué par une ingérence persistante des puissances étrangères ainsi que par des crises. Les violations flagrantes des droits humains plongent le pays dans une misère sans précédent et les paysan·nes, piliers de l’économie de l’île, dans l’oubli et la détresse.

Lors de la 55e session du Conseil des droits de l’homme, le CETIM est intervenu en faveur de la protection et de la promotion des droits humains en Haïti, en particulier ceux des paysan·nes haïtien·nes, en analysant les causes profondes des violations graves et systématiques de ces droits dans ce pays.

Suite à la déclaration de son indépendance en 1804, Haïti a été non seulement contraint de payer une « indemnité » à la puissance coloniale française (150 millions de francs or), mais a aussi subi une longue période d’isolement par les puissances colonialistes. Ceci sans parler des nombreuses interventions militaires étrangères qui ont eu lieu par la suite (par les États-Unis, entre autres). Le système colonial de l’époque se voyait menacé par la première République indépendante noire du monde à avoir aboli l’esclavage. Étranglé par une dette colossale dès sa naissance, menacé en permanence et isolé, ce pays n’a donc pas pu se redresser sur le plan économique et fait face à une crise systémique pluridimensionnelle où les droits humains sont bafoués à grande échelle.

Depuis plusieurs décennies, les gangs criminels règnent en Haïti et sont instrumentalisés par les pouvoirs politiques. De nos jours, ces gangs contrôlent les routes nationales ainsi que 60 à 80% de la capitale. Meurtres, viols et pillages sont les mots d’ordre de ces gangs plongeant le pays dans la terreur et la misère. En 2023, plusieurs milliers de personnes ont été tuées et/ou enlevées, 130 000 personnes déplacées dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince et presque la moitié de la population haïtienne est en situation d’insécurité alimentaire. Les structures économiques et sociales sont mises à mal : les petites entreprises et les écoles ferment, aggravant le chômage, la déscolarisation et la capacité de la population à accéder aux services de première nécessité.

Dans ce contexte, les paysan·nes figurent parmi les premières victimes des violations des droits humains. Alors même que la paysannerie familiale apporte des solutions aux problèmes sociaux et environnementaux, elle est laissée pour compte. Ses besoins élémentaires sont ignorés : elle n’a pas accès à l’eau potable, à l’électricité, aux services de santé, à l’assistance technique, aux infrastructures agricoles… Elle souffre de malnutrition alors qu’elle approvisionnait le pays avec ses produits. La vente de produits agricoles est devenue impossible dans ce climat de terreur. De plus, les terres des paysan·nes sont accaparées par les industriels étrangers qui ambitionnent de « faire d’Haïti un pays capitaliste, une plateforme d’exportation pour le marché américain ». Certain·es sont arrêté·es et torturé·es pour avoir voulu s’opposer à ces projets qui spolient leurs terres.

Durant ces dernières décennies, les multiples interventions qui ont eu lieu, sous couvert de l’ONU, pour « mettre fin aux violations des droits humains » et « aider » Haïti à retrouver la stabilité n’ont été qu’un échec cuisant et ont laissé des séquelles irréparables. Ce pays se trouve sous la tutelle du « Core Group », créé en 2004 et composé entre autres par les États-Unis, le Canada, la France, l’Allemagne et l’Espagne. Cette mise sous tutelle bafoue les droits à l’autodétermination, à la vie et à la dignité du peuple haïtien. Le CETIM appelle les États impliqués à cesser les ingérences, à respecter l’indépendance d’Haïti et les droits humains de sa population, à faciliter une transition démocratique, et à soutenir la production agricole en protégeant les populations rurales.

Lire la déclaration écrite du CETIM

Lire la déclaration orale du CETIM

Voir la vidéo de la déclaration orale 

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