Monsieur le Président,
Les causes de la crise dite alimentaire sont connues de tous : promotion des méthodes agricoles néfastes et des cultures non adaptées, promotion de l’agrobusiness et de la concentration des terres fertiles dans les mains d’une minorité latifundiste, privatisation des mécanismes publics de régulation, promotion des exportations des produits agricoles à des prix de dumping, spéculations boursières, détournement des cultures vivrières pour la fabrication des agrocarburants… la liste est longue.1
Il est heureux d’observer que ces constats, et les sonnettes d’alarme tirées depuis plusieurs décennies par des mouvements sociaux et certaines ONG, soient enfin partagés par la communauté internationale.
Cependant, les réponses apportées à cette crise devraient être à la hauteur de la gravité de la situation et, aussi importantes soient-elles, elles ne peuvent se limiter aux actions humanitaires immédiates. De plus, la composition de la Task Force établie par le Secrétaire général est loin d’être satisfaisante, étant donné qu’elle comprend certains acteurs tels que le FMI, la Banque mondiale et l’OMC qui ont contribué aux politiques à l’origine du désastre actuel alors que les représentants des paysans, acteurs principaux de la production agricole mondiale et en même temps les principales victimes de cette situation en sont exclus.
Dans ce cadre, les Etats devraient revoir leurs politiques économiques, financières et commerciales qui ont conduit à ce désastre, car si des mesures structurelles radicales ne sont pas prises, la crise non seulement perdurera mais de plus s’aggravera.
A ce propos, il est urgent de réformer de fond en comble les institutions financières et commerciales internationales, car il n’est pas tolérable que ces institutions échappent au contrôle démocratique ni que leurs activités contreviennent au droit international en matière de droits humains.
Il est également urgent d’annuler tout accord commercial, bilatéral ou multilatéral, qui provoque la destruction de la production agricole nationale. Cette dernière doit d’ailleurs être destinée en priorité aux besoins des populations locales et s’inscrire dans le cadre de la souveraineté alimentaire.
La spéculation boursière sur les produits alimentaires doit être purement et simplement bannie comme l’a décrété l’Inde depuis l’an dernier. La fabrication des agrocarburants et les cultures OGM doivent être suspendues immédiatement pour une durée minimale de cinq ans.
Monsieur le Président,
Les Etats sont tenus, individuellement et collectivement, à assurer le droit à l’alimentation de tout un chacun. Dans ce cadre, ils doivent coopérer étroitement et être solidaires avec des pays qui se trouvent en difficulté à honorer leurs engagements.
Monsieur le Président,
Les institutions financières et commerciales internationales ainsi que les sociétés transnationales doivent être comptables de leurs actes. Le Conseil des droits de l’homme devrait envisager l’adoption de normes contraignantes pour réglementer les activités de ces dernières. Il doit également se pencher sur un instrument juridique concernant les droits des paysans/paysannes pour une meilleure protection de ce groupe devenu extrêmement vulnérable.
22 mai 2008