I. Le 22 mai, le Conseil de Sécurité, à l’unanimité des 14 Etats membres présents (la Syrie était absente), adopta la résolution 1483, sur la base d’un projet présenté par les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l’Espagne.
La dite résolution :
1) dispose la levée de l’embargo contre l’ Irak;
2) octroie aux Etats occupants de l’Irak le contrôle de l’économie et de l’avenir politique de l’Irak en violation de la 3ème section du Titre III (territoires occupés) de la 4ème Convention de Genève, qui donne des prérogatives limitées aux forces d’occupation d’un territoire étranger.
3) Demande aux Puissances occupantes de travailler à la formation d’une administration provisoire « jusqu’à ce qu’un gouvernement internationalement reconnu et représentatif puisse être établi par le peuple irakien », mais n’établit aucun calendrier pour cela ni un délai pour mettre fin à l’occupation.
4) Prévoit la formation d’un Fond pour le développement de l’Irak, géré par la Banque centrale de l’Irak sous la supervision des Puissances occupantes et approvisionné par les revenus pétroliers. Ce fond sera destiné à la reconstruction économique et à la réhabilitation des infrastructures. La reconstruction économique et la réparation des infrastructures ont déjà été attribuées en exclusivité à des entreprises américaines.
5) De fait, met fin au travail des inspecteurs en désarmement de l’ONU et transfère cette mission aux occupants, en demandant à ceux-ci de tenir informé le Conseil de Sécurité de leurs activités à ce sujet.
6) Pour sauver les apparences, la Résolution demande au Secrétaire Général de l’ONU de nommer un représentant spécial, sans un mandat précis.
II. L’association Américaine de Juristes et le CETIM constatent :
1) Que le Conseil de Sécurité, en reconnaissant l’occupation étrangère pour un temps indéterminé d’un pays indépendant et l’appropriation par les Puissances occupantes de leurs ressources naturelles, spécialement le pétrole , viole les principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies, de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et des Pactes internationaux des droits de l’homme. Et qui plus est, le Conseil de Sécurité accepte qu’un Etat indépendant soit mis dans une situation inférieure à celle prévue dans les Chapitres XI et XII de la Charte de l’ONU (territoires non autonomes et régime international d’administration fiduciaire)
2) Que la Résolution 1483 est en contradiction flagrante avec la Résolution 1514(XV) de l’Assemblée Générale de l’ONU du 14 décembre 1960 (Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux) qui proclama solennellement :
« La sujétion des peuples à une subjugation , à une domination et à une exploitation étrangères constitue un déni des droits fondamentaux de l’homme, est contraire à la Charte de las Nations Unies et compromet la cause de la paix et de la coopération mondiales. »
3) Que la résolution 1483 rétablit officiellement dans la coutume internationale les guerres d’agression, le colonialisme et le néocolonialisme et le saccage systématique des ressources des pays victimes de ces crimes.
4) De fait, en acceptant la fin de la tâche des inspecteurs en désarmement de l’ONU, le Conseil de Sécurité viole ses propres résolutions, et plus grave encore qu’il délègue la mission des inspecteurs aux puissances occupantes, dont leurs gouvernements ont trompé à plusieurs reprises leurs parlements, le Conseil de Sécurité et l’opinion publique à propos de la menace imminente que représentait l’existence « supposée » d’armes de destruction massive en possession du régime de Saddam Hussein.
III. L’Association Américaine de Juristes et le CETIM déplorent la désignation par le Secrétaire Général des Nations Unies du Haut Commissaire de Nations Unies pour les droits de l’homme en tant que son représentant en Irak. Ce dernier ayant abandonné – à ce qu’il paraît temporairement- les fonctions de sa charge conférée par le mandat de l’Assemblée Générale, afin de tenter de donner des lueurs de légitimité à l’occupation illégale d’un Etat indépendant.
IV. L’Association Américaine de Juristes et le CETIM arrivent donc à la conclusion que la querelle entre les grandes puissances à la veille de l’agression contre l’Irak n’a pas été déterminée par les principes mais par le souci du partage du butin. Et que maintenant a été rétablie la solidarité parmi elles sur la base de la reconnaissance du rôle hégémonique des Etats-Unis dans cette nouvelle Sainte Alliance contre les peuples – le G8 – autour de “valeurs communes” telles que la loi du plus fort, le colonialisme, le néocolonialisme et le total mépris des principes fondamentaux du droit international, y compris les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels et le droit international humanitaire.
V. L’Association Américaine de Juristes et le CETIM invitent la Sous-Commission de la promotion et la protection des droits de l’homme à se prononcer sur ces graves violations de la légalité internationale et sur l’amputation de la tête – même temporaire – du Bureau du Haut Commissariat pour les droits de l’homme des Nations Unies.