Monsieur le Président,
Dans sa résolution 2003/83 sur le droit au développement, la Commission des droits de l’homme a demandé à la Sous-Commission d’élaborer « un document conceptuel, en vue de définir des options pour la mise en œuvre du droit au développement et leur faisabilité, notamment une norme juridique internationale de caractère contraignant, des lignes directrices relatives à la mise en œuvre du droit au développement et des principes applicables à un partenariat pour le développement ».
De nombreuses résolutions de l’Assemblée générale de l’ONU et de la Commission des droits de l’homme soulignent l’importance du droit au développement et la priorité qui devrait lui être accordée par les instances de l’ONU en vue de sa réalisation.
Pour le CETIM, la promotion du droit au développement implique la nécessité de reconnaître formellement la validité, l’indissociabilité, le caractère obligatoire et justiciable de tous les droits humains, y compris celui de la solidarité, qui figurent dans de nombreux instruments internationaux. Elle implique aussi de remplacer les relations d’exploitation et de subordination par des relations entre égaux, tant au niveau interpersonnel qu’international, de manière à ce que tous les peuples et tous les êtres humains sans exception puissent jouir de tous les droits. Il s’agit d’éliminer ainsi le paradoxe suivant lequel malgré les formidables progrès de la science et des techniques et la vertigineuse augmentation de la productivité et des biens disponibles, les conditions de vie d’une bonne partie de l’humanité sont chaque jour de plus en plus déplorables.
Certains prétendent que la Déclaration sur le droit au développement n’est pas contraignante, au motif qu’il n’existe à ce jour aucune Convention dûment ratifiée par les Etats. Nous pensons qu’il n’est pas nécessaire d’élaborer une nouvelle convention sur le Droit au développement. En effet, on oublie que la Déclaration sur le droit au développement est la synthèse de tous les droits humains, aussi bien les droits civils et politiques que les droits économiques, sociaux et culturels. Et on oublie également qu’il existe un Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, entré en vigueur depuis bientôt 30 ans, et qu’il a caractère contraignant pour les Etats. Et, ce Pacte, avec celui sur les droits civils et politiques, la Déclaration universelle et la Charte, constituent la base même du Droit international en matière des droits de l’homme. En ce sens, la Déclaration sur le droit au développement doit être considérée au même titre que la Déclaration universelle des droits de l’homme.
La mise en oeuvre du droit au développement implique également le caractère obligatoire de la coopération internationale. Plus que jamais, la communauté internationale doit respecter la Déclaration universelle des droits de l’homme et tous les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. L’équité doit être au centre de tout système économique et politique.
En ce sens, le « Consensus de Washington » constitue l’un des principaux obstacles pour la réalisation du droit au développement. En effet, une évaluation objective de la réalité montre que la crise actuelle de l’économie néolibérale, avec le développement spectaculaire de la spéculation financière, des turbulences et d’une instabilité endémique, procède de politiques conscientes imposées de manière unilatérale avec une ferveur fondamentaliste dans l’unique but de servir les intérêts de capitaux financiers et de sociétés transnationales.
Dans le contexte de la mondialisation, on ne peut occulter les entraves causées par des politiques économiques au niveau international, en donnant la priorité aux problèmes rencontrés au niveau national alors qu’on a pratiquement dépouillé les Etats-nations de leur souveraineté!
Lorsqu’on parle de mise en oeuvre du droit au développement, on ne doit pas oublier que la dette constitue un supplice pour la majorité des pays du Sud et est un obstacle majeur au développement. La seule solution envisageable est l’annulation de celle-ci.
Pour aider la Commission des droits de l’homme dans sa tâche, la Sous-Commission devrait :
1. étudier en priorité les incidences des questions économiques internationales sur l’exercice du droit au développement ;
2. veiller sur la primauté des droits de l’homme dans tout accord international en matière commerciale ou financière ;
3. déterminer les moyens de renforcement de la coopération internationale, qui ne saurait se résumer à des aides financières, mais implique le soutien bienveillant aux logiques de développement souhaitées par chaque nation ;
4. faire des recommandations aux Etats et aux institutions internationales pour la promotion et la réalisation du droit au développement.
Monsieur le Président,
S’agissant du droit à l’eau, il est consacré directement dans plusieurs instruments internationaux en matière de droits de l’homme, comme l’indique le rapporteur spécial dans son rapport . Dans son Observation générale N° 15 , le Comité des droits économiques, sociaux et culturels précise le contenu du droit à l’eau et ses liens avec les autres droits de l’homme. Il donne, tout comme le Rapporteur spécial, des pistes pour la mise œuvre de ce droit, tout en précisant les obligations des Etats. Nous pouvons affirmer avec le rapporteur spécial que l’eau doit faire l’objet d’une réglementation et d’un contrôle de la part des pouvoirs publics, avec la participation des communautés, afin que tout un chacun puisse bénéficier de ce droit. Ceci permettra de prévenir les conflits autour de ce bien commun de l’humanité.
Genève, le 4 août 2004