Monsieur le Président,
Le rapport élaboré par l’ex-Haut-Commissaire aux droits de l’homme par intérim sur la situation actuelle des droits de l’homme en Irak a été soumis à l’examen de la présente session .
Bien que ce rapport mentionne des violations commises par les forces armées de coalition engagées en Irak, il reste muet sur l’utilisation des mercenaires et de leurs conséquences dans ce conflit. De plus, il prend pour argent comptant la déclaration du Président Bush du 10 mai 2004, suite aux cas de torture dénoncés dans la prison Abou Ghraib, selon laquelle « les Etats-Unis respecteraient la légalité et que les autorités examineraient les opérations dans les prisons iraquiennes afin de s’assurer que de tels délits ne se reproduisent plus » (para. 65).
Pourtant, l’implication des mercenaires dans des violations des droits humains est de notoriété publique lors de nombreux conflits dans le monde, en particulier en Irak où l’armée américaine a engagé 20 000 mercenaires .
D’ailleurs, la Rapporteuse spéciale sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes nous informe que « les militaires [impliqués dans la pratique de la torture en Irak] ont affirmé avoir agi en partie sur instruction d’employés de sociétés militaires privées, recrutés par le Pentagone pour procéder aux interrogatoires . »
A ce propos, l’ex-Haut-Commissaire par intérim se contente de se référer aux observations des Etats-Unis selon lesquelles la juridiction pénale de leurs tribunaux fédéraux serait compétente pour juger les mercenaires engagés en Irak par l’armée américaine (para. 24).
Or, selon la Rapporteuse spéciale sur l’utilisation de mercenaires « un employé d’une société privée qui a été accusé d’avoir violé un prisonnier n’avait pas été inculpé parce que la compétence de la juridiction militaire n’avait pas pu être établie . »
Faut-il préciser que le décret N° 17 de l’Autorité provisoire en Irak interdit aux tribunaux irakiens d’être saisis de tout acte répréhensible des forces de la Coalition et, de ce fait, leur assurent l’impunité ? Bien que l’ex-Haut-Commissaire par intérim cite ce décret dans son rapport (para.117), il ne se prononce pas sur sa légitimité ! Pourtant celles qu’on appelle les autorités de la coalition sont des occupants, suite à une guerre qualifiée, à juste titre, par le Secrétaire général de l’ONU d’illégale, et à ce titre, tous leurs décrets devraient être déclaré nuls et non avenus.
Monsieur le Président,
La question de l’utilisation des mercenaires ne peut pas être prise à la légère, car non seulement elle déstabilise des gouvernements, mais également menace le bon fonctionnement de la démocratie et de l’application effective des droits humains. Justement, la Rapporteuse spéciale attire l’attention de la communauté internationale en ces termes : « La nature et le degré de responsabilité des sociétés internationales privées d’assistance militaire et de leurs salariés sont incertains, ce qui ouvre la voie à l’impunité pour toute une gamme d’actes qui seraient autrement qualifiés de criminels . »
C’est pourquoi le CETIM appelle la Commission des droits de l’homme à prêter une attention particulière sur cette question et à suivre les recommandations du Rapporteur spécial sur la définition des mercenaires pour modifier la Convention contre le recrutement, l’utilisation, le financement et l’instruction des mercenaires .